OPINION | RC Lens : Un bilan noté avant la coupe du monde

OPINION | RC Lens : Un bilan noté avant la coupe du monde

La surprise lensoise commença lors de la saison 2019-2020 avec une drôle d’accession en Ligue 1. Cette dernière fut acquise à la 28ème journée de Ligue 2 car elle n’est pas allée plus loin, avortée par la pandémie de la COVID-19. Une montée scellée après un but sur penalty du narbonnais Florian Sotoca contre l’US Orléans le 9 mars 2020 dans un stade Bollaert-Delelis tristement vide et silencieux. Un court succès 1-0 sans gloire mais qui signa le retour du club emblématique dans l’élite et ouvrit une nouvelle ère…

L’équipe nordiste, avec à sa tête son tout nouvel entraîneur Franck Haise (51 ans), afficha une maîtrise et une qualité de jeu impressionnante dans un système en 3-4-3.Un dispositif la portant aux portes des compétitions européennes les deux années suivantes. Le RC Lens termina à la 7ème place lors des deux exercices.

Aujourd’hui, à la trêve coupe du monde 2022, le RC Lens signe le meilleur début de saison de son histoire et pointe à la seconde place à 5 points du géant Parisien. Le classement est prodigieux avec 36 points au compteur, associé aux victoires contre les têtes d’affiche du championnat devenus des concurrents : Rennes, Marseille, Monaco, Lyon (et la surprise lorientaise). Une seule défaite, lors du derby face à Lille, vient « ternir » le tableau.

Quelles sont les clés de cette réussite sur le terrain et jusqu’où peut aller le RC Lens ?

I. Une défense de fer.

Le RC Lens possède la deuxième meilleure défense de ligue 1 derrière le Paris-Saint-Germain (9 buts encaissés) en ayant concédé que 10 petits buts soit une moyenne de 0,66 but/match.

Tout commence par le dernier rempart élu meilleure recrue du club par ses supporters : Brice Samba. Le français a débarqué cet été en provenance de Nottingham Forrest et a mis tout le monde d’accord dès les premiers matchs de préparation. La sérénité qu’il dégage, son assurance, son jeu au pied et sa justesse technique ont tout de suite marqué les esprits. Il est parvenu à garder ses cages inviolées en ligue 1 à 7 reprises en jouant les 15 journées. Note moyenne : 6,43/10. Élu homme du match par la rédaction à 2 reprises.

Suis le système à trois défenseurs centraux avec les deux pistons. Le trinôme composé de Jonathan Gradit, Kévin Danso et Facundo Médina, fonctionne parfaitement. Les automatismes acquis lors des saisons précédentes et leur progression individuelle sont frappants.

Le premier, surnommé la perceuse, n’hésite pas à transpercer les lignes pour remonter le danger sans en oublier de bien défendre derrière. J. Gradit était probablement le défenseur le plus en forme en début de saison jusqu’à ce qu’il se blesse à la clavicule contre l’ESTAC lors de la 7ème journée. Il revient cependant plus tôt que prévu contre le TFC à la 13ème journée fin octobre et malgré le manque de rythme il parvient à faire de belles prestations. Sa note moyenne : 6,44/10 pour 9 matchs joués.

Le second a commencé timidement sa saison pour ensuite exploser et devenir le patron de la défense. K. Danso a pris ses responsabilités après la blessure de son coéquipier en se montrant intraitable défensivement. Le roc autrichien hérite d’une note moyenne de 5,93/10 pour 15 matchs joués. Élu homme du match par la rédaction à 2 reprises.

Le dernier, F. Médina, a été le plus régulier et a gommé les erreurs techniques qu’il pouvait commettre les précédentes saisons, des manquements amenant à la perte de précieux points sur certains matchs. Sa grinta sud-américaine apporte un supplément de niaque à son équipe et il n’hésite pas à se positionner haut sur le terrain pour apporter le surnombre dans la moitié adverse. Note moyenne : 6,32/10 pour 14 matchs joués.

Concernant la rotation en défense centrale, C. Wooh ayant filé dans les dernières heures du mercato, c’est l’international malien Massadio Haïdara qui a parfaitement suppléé J. Gradit lors de son absence. Le gaucher qui s’est retrouvé à droite a été régulier dans ses prestations. Mis à part son match contre le LOSC où il provoque un penalty évitable, il s’est montré digne d’un bon titulaire. Note moyenne : 5,75/10 pour 8 titularisations.

Se greffent ensuite les pistons. Le départ de J. Clauss a suscité de l’inquiétude auprès des supporters mais celle-ci n’a pas duré très longtemps. Le couloir droit s’est partagé entre Przemyslaw Frankowski et la recrue angevine Jimmy Cabot. Le polonais a débuté la saison moyennement, lui qui était habitué au couloir gauche, pour perdre petit à petit sa place dans le onze au profit du français.

J. Cabot est monté en puissance et ses prouesses techniques l’ont installé dans un rôle de titulaire. Malheureusement il est coupé dans son élan en subissant une grave blessure (rupture des ligaments croisés) contre le MHSC lors de la 11ème journée. Saison terminée pour lui. (Joker médical utilisé par le club qui vient de signer J. Le Cardinal – Paris FC*). Il termine sa saison avec une note moyenne de 6,10/10 pour 5 titularisations. P. Frankowski a repris le flambeau et a semblé libéré de sa rude concurrence. Cela s’est ressenti dans les matchs suivants, notamment après le match contre l’OM, où il s’est montré remuant et très percutant offensivement. Note moyenne : 6,00/10, sur 12 matchs.

Couloir gauche, on retrouve Deiver Machado. Le colombien est dépourvu de concurrence depuis les repositionnements de Frankowski à droite et de Haïdara en défense centrale. Ce manque de solution lui a permis de s’installer dans un fauteuil de titulaire et de progresser sur son flanc. Le rôle de piston lui est désormais parfaitement bien intégré et il s’incorpore très bien dans l’animation demandée par Frank Haise. Note moyenne : 5,87/10 pour 12 matchs. Son remplaçant est le jeune Ismael Boura, il effectue de bonnes entrées en fin de match.

II. Un solide milieu box-to-box.

Le milieu passe avant tout par son capitaine. Après un mercato estival chaud bouillant jusqu’à la fin, le feuilleton Seko Fofana a pris fin avec une prolongation de contrat jusque 2025. Un message fort envoyé aux clubs courtisans et à la concurrence, le Racing n’est pas là pour se faire piller ! En solidifiant le projet sportif du RCLens avec cette annonce et le recrutement effectué à l’intersaison, le club minier a pu débuter le championnat sur de solides bases.

S. Fofana a livré un gros début de saison grâce à son impressionnant volume de jeu. L’enchaînement des matchs et sa régularité l’ont poussé à un retour en équipe nationale où il s’est montré décisif en étant buteur. Cependant, après une petite blessure, le joueur a eu une grosse baisse de régime pendant plusieurs semaines, ce qui est à souligner car son remplaçant Lukasz Poreba s’est montré encore bien trop tendre pour la ligue 1 (4/10 sur 3 matchs). Le renfort de Jean Onana n’y est pas étranger (4,5/10 sur 2 titularisations). Le norvégien P. Berg aurait pu avoir sa carte à jouer mais ce dernier a préféré rentrer au bercail en Norvège à Bodo Glimt. Le retour du capitaine lensois a donc été un soulagement malgré des performances en dents de scie. Il finit bien la première partie de saison, tel un boulet de canon et n’a manqué de pas grand-chose sa distinction d’homme du match lors de la dernière confrontation face à Clermont Foot63. Note moyenne : 6,20/10 pour 12 matchs joués. L’ivoirien a été élu homme du match par la rédaction à une reprise.

La deuxième pierre angulaire de l’équipe est un nouvel arrivant qui a eu la difficile tâche de remplacer Cheick Doucouré parti pour la Premier League, Salis Abdul Samed. Presque inconnu quand il a déposé ses valises, il est devenu incontournable voire indéboulonnable. Son association avec S. Fofana est parfaite. Il est le travailleur de l’ombre, toujours constant et infatigable. Note moyenne : 6,30/10 après 15 matchs. Nommé par la rédaction homme du match une fois.

III. Une attaque ambitieuse.

Le plus gros chantier du mercato estival avec beaucoup de mouvements. Arnaud Kalimuendo n’a pas vu son prêt reconduit budgétairement, Corentin Jean a embrassé le rêve américain à l’Inter Miami, Simon Banza est resté au Portugal, Ignatius Ganago est parti tenter sa chance au FC Nantes et Gael Kakuta ne rentrait plus dans les plans (Amiens SC). Seul Florian Sotoca et W. Said sont restés au club avec la jeune pépite de la gaillette David Pereira Da Costa.

C’est donc toute une attaque qui était à reconstruire.

Le club a donc lancé des paris en commençant par le plus gros transfert du club en termes d’achat : l’espoir belge Lois Openda. (10M€ hors bonus). Après avoir misé sur la jeunesse et l’avenir, le club a recruté un buteur polonais jouant en MLS : Adam Buksa puis a complémenté son effectif par le prêt d’Alexis Claude-Maurice (OGC Nice).

Trois joueurs se sont tout de suite affirmés dans le onze de départ et ont marqué de leur empreinte. En premier lieu, Florian Sotoca ! Le sudiste d’origine a conquis la terre artésienne et commence maintenant à bâtir sa renommée dans le nord. Un départ fracassant, dès la première journée contre Brest, où il inscrit un triplé et lance son incroyable début de saison. Puis ont suivi des prestations exceptionnelles où il a porté son équipe dans les moments difficiles pour les mener jusqu’à la victoire. Sa combativité et son rôle d’électron libre dans l’animation ont fait de lui le meilleur joueur lensois. Il se démarque dans les statistiques avec 6 buts et 5 passes décisives (3ème, derrière L. Messi et Neymar). Il aurait pu soigner encore mieux ses stats s’il n’avait pas manqué deux penaltys (sur trois!). Note moyenne: 6,71/10 après 14 matchs joués. Il a été nommé 7 fois homme du match par la rédaction.

Le deuxième, c’est Lois Openda qui a bénéficié des faveurs de son entraîneur. Le jeune espoir s’est montré décisif et très bon les 7 premières journées avant de flancher et de connaître une disette niveau but. Franck Haise a donc lancé son remplaçant Wesley Said qui semble enfin tranquille avec les pépins physiques. Il s’est démarqué en étant buteur dans les moments importants, en étant parfois impressionnant comme en atteste son but marqué sur un slalom face à Lorient. Sa note moyenne est de 6,33/10. C’est piqué au vif que L. Openda fait son retour. Dans un match compliqué à domicile face à Toulouse, le remplaçant entré à l’heure de jeu claque un triplé en 30 minutes pour offrir la victoire aux siens (3-0). Un exploit qui a probablement aidé au choix du sélectionneur de la Belgique à le convoquer pour la coupe du monde au Qatar. Note moyenne : 6,25/10 sur 12 matchs. Il a été élu homme du match par la rédaction une fois avec un (très rare) 10/10 !

Le troisième attaquant est le jeune espoir portugais de 21 ans David Pereira Da Costa. Placé dans un rôle de titulaire devant G. Kakuta, le numéro 20 a passé un nouveau palier. Il est capable de provoquer des décalages, de dribbler et de dynamiter les défenses grâce à sa qualité technique. Il s’intègre bien au dispositif, cependant il a encore parfois du mal à se distinguer. Son important temps de jeu cette saison va lui permettre de progresser avec pour objectif de s’affirmer un peu plus à l’avenir. Note moyenne: 5,88/10 sur 13 titularisations.

Dans la rotation, Alexis Claude-Maurice est celui qui s’est le plus mis en valeur. Il a effectué de bonnes entrées notamment au niveau des passes décisives. Ceci-dit, sa seule titularisation n’a pas été bonne avec une note accréditée de 4/10.

Concernant Adam Buksa le début de saison est pour lui plus que compliqué. Arrivé blessé (fracture du pied) dans l’Artois, l’international a manqué la présaison et le début du championnat. Il a effectué quelques rares entrées en fin de match où il a montré un niveau de jeu inquiétant. Son manque de rythme et le retard physique affiché vont être difficile à corriger d’autant plus qu’il manque la coupe du monde avec son pays due à une rechute au niveau de sa blessure… Seul l’avenir nous le dira, mais pour l’instant on se dirige vers un flop à 6 millions d’euros.

On remarque que l’attaque est redoutable avant tout grâce au collectif et non par ses individualités. Avec 26 buts marqués (4ème attaque avec l’OM, Lorient et Troyes), la puissance collective ressemble à un rouleau compresseur écrasant tout sur son passage pour aller scorer. Une mayonnaise qui a réussi à prendre grâce à Franck Haise devenu manager général.

IV. Feu de paille ou futur club européen ?

Lorsque nous analysons le chemin parcouru depuis 2019, nous remarquons l’ascension fulgurante du club centenaire. Mais est-ce vraiment étonnant ?

L’histoire du club a été remise en avant par ses nouveaux dirigeants afin de revenir à ses valeurs perdues au fil des années au purgatoire de l’antichambre. Les finances sont repassées au vert et un projet sur le long terme à vue le jour. Tout cela est passé en premier lieu par le staff et une philosophie de jeu instaurée depuis 3 ans maintenant. On peut constater que la mission de maintenir le club en ligue 1 est largement dépassé, que sa pérennisation au sein de l’élite a désormais de solides bases. Les recruteurs effectuent un bon travail comme le démontre encore l’effectif de cette saison.

Sans oublier leur public, leur douzième homme, à domicile (8 matchs/8 victoires) qui amène sa ferveur unique dans l’hexagone. Rien que pour lui, on souhaite y croire.

Rédacteur: Mathias Crepelle

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